Warning: Attempt to read property "id" on null in /home/sustraia/public_html/components/com_content/views/category/view.html.php on line 271

Warning: Attempt to read property "id" on null in /home/sustraia/public_html/components/com_content/views/category/view.html.php on line 271

 Azeria predikatzen ari, kasu oiloari (Elgar N° 619 Mai/Juin 2023)

 "Azeria predikatzen ari, kasu oiloari"

(Quand le renard est en train de prêcher, attention à la poule.)

Le caractère plutôt taiseux des Basques et leur méfiance instinctive à l'égard de ceux qui parlent beaucoup et fort sont très connus. Au-delà de ce trait de caractère, ce joli proverbe fait directement référence au fait que quelqu'un disant à d'autres savoir ce qui est bon pour eux, est beaucoup plus souvent animé de mauvaises intentions à leur encontre. De mauvaises intentions soigneusement cachées par les belles paroles. Cela peut s'appliquer à un grand nombre des personnes : un prêtre, un marchand... ou un homme politique.

 

Jean-Baptiste Heguy

 

 

 Behera, gora, garai : les hauts et les bas du basque Elgar N° 618 Mars/Avril 2023)

En euskara, bas se dit "behere" et haut se dit gora ou garai. On retrouve par exemple behere dans Nafarroa Beherea, qui désigne la province de Basse-Navarre. On retrouve aussi le mot dans de nombreux noms de famille. Ainsi on trouve par exemple : Etxebehere/Etchebehere ou Beherretxe/beheretche signifie la maison du bas. De même Errotabehere signifie le moulin du bas de errota : le moulin. Avec gora, on trouve par exemple les sommets navarrais de Gorramendi (1070 mètres) ou de Gorramakil (1087 mètres) dont les noms signifient littéralement Montagne haute de mendia la montagne et le Bâton haut de malika le bâton. On le retrouve aussi dans l'expression gutxi gora behera, qui signifie plus ou moins, mais qui littéralement se traduit par moins haut bas. le mot garai pour haut, se retrouve très couramment dans de nombreux noms de famille comme Etxegarai / Etchegaray, qui signifie la maison du haut, qui peut aussi traduire Bordagarai / Bordagaray. Quelquefois, on trouve même des composés comme Etcheverrigaray, qui signifie littéralement, la maison neuve du haut de berri, neuf, nouveau.

 

Jean-Baptiste Heguy

 

 

 Des fleurs au nom très évocateur Elgar N° 619 Mai/Juin 2023)

En basque, on retrouve souvent des noms de fleurs assez classiques traduits littéralement comme "arrosa" (la rose), hiazintoa" (la jacinthe) ou" hortensia" (l'hortentsia). Mais on trouve aussi pour lesquels le peuple basque a fait preuve d'une grande poésie, voire d'une imagination débordante.

Ainsi, en euskara, la tulipe peut se dire "tulipa", mais elle peut aussi être appelée idi-bihotza", ce qui signifie littéralement "coeur de boeuf" (de "idia", le boeuf et "bihotza", le coeur). Une appellation qui fait certainement référence à la forme arrondie des corolles de tulipes ou la couleur de certaines d'entre elles qui peut aller du rouge au rouge violacé ou au violet, ce qui peut rappeler précisément un "coeur de boeuf". La marguerite, ou la pâquerette sont appelées en euskara "bitxilorea", c'est à dire la "fleur-bijou" 'de "lorea", la fleur et "bitxia", le bijou). Le chrysanthème se dit "urrelilia", ce qui veut dire "la fleur d'or" (de"lilia", la fleur, et "urgea", 'or) qui est une traduction littérale de "chrysanthème', qui vient du grec "khrusos", l'or et "antes", la fleur. La primevère a suivi aussi un chemin étymologique similaire. On l'appelle en basque "udaberri-lore" ou "San Jose lore", qui signifie "fleur du printemps" (de "udaberri", le printemps). Le mot "San Jose lors" fait référence au fait que la Saint Joseph tombe le 19 mars et annonce le début du printemps (21 mars). Rappelons que l'étymologie de "primevère" vient du latin "prima", première et "vera" le printemps car c'est la première fleur qui réapparaît au printemps, qui se dit d'ailleurs en italien "primavera". Certaines autres fleurs ont fait l'objet d'appellation beaucoup plus inattendues, ainsi la digitale, dont le nom vient du latin "digits", en raison de la forme de doigt de sa corolle. Les Basques y ont vu une autre chose puisqu'ils l'ont appelée "kukupraka", c'est à dire "le pantalon du coucou" (de "parka", le pantalon. Quand à la jonquille, elle est appelée de différentes manières en basque, mais la plus étrange reste "txoriburua" (littéralement "tête d'oiseau", de "txoria", l'oiseau et "bureau", la t^te). Nous sommes bien en peine de comprendre comment les Basques ont fait le parallèle !

 

Jean-Baptiste Heguy

 

 

 L'irrintzina, l'étrange cri des Basques Elgar N° 620 Juillet/Août 2023)

Personne ne sait réellement d'où vient l'irrintzina, ce cri modulé et très puissant originellement utilisé par les bergers basques pour communiquer de manière lointaine et qui porterait à près de dix kilomètres. A présent, il est devenu un cri festif ou de joie qui ponctue souvent les danses ou les chants traditionnels basques et fait même l'objet depuis une trentaine d'années d'un concours à Urcuray (urkoi), un quartier d'Hasparren, dans la province du Labourd.

Si maintenant, l'irrintzina a acquis un vrai aspect festif, sa signification originelle se perd dans la nuit des temps. Mais laissons Pierre Loti nous le décrire, comme il fait dans son célèbre roman "Ramuntcho" :

"Mais tout à coup, de cette barque qui était si tranquille et qui n'avait plus que l'importance d'une ombre à peine réelle au milieu de tant de nuit, un cri s'élève suraigu, terrifiant : il remplit le vide et s'en va déchirer les lointains... Il est parti de ces notes très hautes qui n'appartiennent d'ordinaire qu'aux femme, mais avec quelque chose de rauque et de puissant, qui fait davantage frémir ; on attend avec une sorte d'angoisse qu'il finisse, et il est long, long, il oppresse par son inexplicable longueur... Il avait commencé comme un haut bramement d'agonie, et voici qu'il s'achève et s'éteint en une sorte de rire, sinistrement burlesque, comme le rire des fous.

Etymologiquement, "irrintzina" vient du mot basque "irri, irria" qui signifie rire "et "intzina", qui veut dire "plainte ou gémissement. L'irrintzina est donc tout à la fois un rire et une plainte. Rappelons aussi qu'en basque, "irrintzina" ou "irrintzia" signifie aussi "hennissement". Un rapprochement qui semblerait attester le fait que'à l'origine les Basques se sont peu t être inspirés du hennissement des pottoka pour créer et reproduire l'irrintzina. La légende voudrait aussi que les Vascons qui ont anéanti l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne lors de la bataille de Roncevaux le 15 août 778, auraient utilisé l'irrintzina pour mieux coordonner leurs attaques.

Certains historiens et ethnologues ont aussi rapproché l'irrintzina d'un autre moyen de communication très particulier utilisé" dans le Béarn, le langage sifflé utilisé par les bergers, notamment dans la vallée d'As/ Avec ce système de sifflement suraigu, les bergers des hautes vallées béarnaises ont toujours pu communiquer très facilement. Ces langages sifflés existent aussi dans d'autres parties montagneuses du monde, comme la Turquie ou aux Iles canaries, à l'époque où elles étaient encore occupées par leur peuple originel, les Guanches. Un clin d'oeil de l'histoire amusant puisque, précisément, les Basques ont été autrefois rapprochés des Guanches...  

 

Jean-Baptiste Heguy

 

 

 "Pe" (Elgar N° 620 Juillet/Août 2023)

Comme souvent en euskara, le mot "pe" post-position qui signifie "la partie inférieure" ou "la partie basse ou en dessous", doit très certainement être un mot très ancien comme d'autres mots basques très courts (comme "su" (feu), "ur" (eau), "erre" (brûler) etc...). Et cette petite particule est très souvent utilisée pour former de nombreux mots en euskara, ainsi du terme "harpea", siginfiant "grotte" (littéralement, "le lieu sous la pierre, ou la roche", de 'Harria", la pierre). A noter que "Harpea" est aussi le nom propre d'un célèbre abri sous roche situé à Esterençuby (Basse-Navarre) et formé d'un pli rocheux anticlinal naturel qui sert depuis très longtemps d'abri pastoral.

On retrouve "pe" dans le nom basque originel de la commune de L'Hôpital Saint-Blaise, situé en Soule. Connu pour son extraordinaire église romane du XIIème siècle agrémentée de décors intérieurs hispano-mauresques est classé au patrimoine mondiale de l'UNESCO, le village est connu en dialecte souletin sous le nom de "Ospitalepea", qui signifie littéralement "sous l'hôpital", en référence au fait que le village était situé en contrebas d'un "hôpital", en réalité un lieu d'accueil pour les voyageurs et pèlerins qui étaient en route pour Saint Jacques de Compostelle.

A noter que "pe" se retrouve aussi dans quelques noms de famille basque répandus comme "Intxauspe Inchauspe", qui signifie littéralement "sous le noyer" (de "intxaur", la noix ou le noyer) ou "Erramuspe/Erramuzpe), qui signifie "sous le laurier" (de "erratum", le laurier)

Jean-Baptiste Heguy